Nous en sommes arrivés aujourd’hui à des extrêmes qui font froid dans le dos. C’est inouï. Imaginez la scène suivante, qui est authentique : un gamin de quatre ans, il porte encore des couches, mais manie l’iPhone, l’iPad, l’ordinateur de sa mère et se permet de corriger sa sœur de deux ans son aînée, pour avoir mal su cadrer pour prendre une photo à partir d’un smartphone. Aussi simple que ça. Aussi stupéfiant et inquiétant. J’ai assisté avec stupéfaction à une telle démonstration de technicité, de la part d’un môme, moi qui suis encore à balbutier devant un engin aussi sophistiqué qu’un téléphone.
Sa maman, qui est une connaissance, m’a expliqué que c’était top que son fils sache manier tout cet attirail, parce que, dit-elle, «l’avenir est dans la machine». Et elle invite son enfant à nous montrer toute l’étendue de son savoir-faire et de sa maîtrise de ces jouets high-tech. Et l’enfant s’exécute en passant d’une machine à l’autre en surfant sur plusieurs réseaux et plusieurs canaux. La mère jubile devant la maestria de ce bébé qui s’excite de plus belle en poussant de drôles de cris.
Pour ma part, je suis atterrée devant ce spectacle étrange qui me semble d’une grande anormalité étant donné l’âge de l’enfant et les encouragements des parents qui sont convaincus que c’est là une très bonne chose de voir son enfant manier la technologie avec autant d’aisance. J’avoue que je ne voudrais pas être là pour voir ce temps, pas si lointain que cela, où les machines vont nous supplanter comme des propres à rien.
Ce temps où des enfants en bas âge sont livrés à eux-mêmes avec plusieurs machines entre les mains, coupés des réalités, vivant sur des écrans à longueur de journée. J’avoue également que c’est bien d’être de son époque, de ne pas vivre et mourir bête, mais de là à encourager son fiston à devenir une bête de foire, qui arbore toute sa panoplie électronique en maniant les claviers et autres touches invisibles avec autant de dextérité, il y a un pas que certains parents veulent bien franchir. Cet exemple est loin d’être un cas isolé. Loin de là. De très nombreuses familles nous affirment que plusieurs de leurs enfants sont déjà accros aux smartphones passant des heures et des heures à jouer, à naviguer sans aucun contrôle ni surveillance de la part d’un adulte.
En effet, ce qu’il faut retenir c’est que ces enfants n’ont plus aucune autre vie que celle liée à l’électronique dans sa grande variété. Téléphones, tablettes, ordinateurs, télévision, consoles de jeu… tout un arsenal qui a littéralement envahi la vie de beaucoup de familles dans notre pays, avec tout ce que cela implique comme impact et comme conséquences souvent irréversibles.
Dans ce sens, je me demande comment un gamin de quatre ans peut avoir un profil sur les réseaux sociaux avec l’accord et le sourire des parents. Là, je dis que je suis franchement arriérée et loin du compte. Cet enfant a déjà ses contacts, ses amis, ses «j’aime» et il est déjà contrarié quand on n’a pas commenté une de ses photos. Il s’énerve. Il pleure. Il crie et il hurle. Comme je l’ai dit, ce gosse n’est pas un cas unique. Loin s’en faut. Des comme lui sont légion et pas seulement dans ce beau pays qu’est le Maroc. Des enfants addicts et en souffrance. Des enfants qui présentent déjà de graves problèmes de comportement et d’adaptation en famille, à l’école et avec les autres enfants. Je me demande juste ce que sera ce môme dans dix ans. J’espère pour lui qu’il aura une vie réelle, loin du virtuel.
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